Lettre 30 Camille à Gaspard

Camille de Riveblême à Gaspard Bromzières

Ah ! Gaspard ! Vous suscitez en moi des souvenirs ! Je ne peux pas sans sourire évoquer la rime que vous aviez un soir trouvé à « bathyscaphe». Batteuler dans un estaminet… Roche de Canon… Comme tout cela me paraît lointain, posé sur l’océan, au milieu de nulle part, sentant le navire grincer et vibrer d’une vie particulière et la houle en faire sa coquille de noix.
En dépit de votre enthousiasme, j’aimerais beaucoup mieux que surgisse une aventure, une île, quelque chose d’inattendu que me consacrer à l’écriture d’un livre de poèmes.
Dites-moi cette solution que vous avez trouvée pour vous libérer, j’aurai le plaisir de vous imaginer dé
On me vient chercher

Je reprends. J’ai dit que nous étions au milieu de nulle part ? Oui, sans doute, mais nous n’y sommes plus seuls. La vigie signale un point à l’horizon, et, de toute évidence, il s’agit d’un navire. Pour être plus précis, d’un frêle esquif, comme ceux qui, dans les romans, conservent en vie des naufragés jusqu’à ce qu’un bateau providentiel surgisse à l’horizon. Ma longue-vue ne me permet pas encore de distinguer si un être vivant se trouve à bord.
Je remonte observer.

Je reprends. Il y a bien quelqu’un à bord de cette barque mais, du diable si cette personne est morte ou vive. Je préférerais vive, afin d’avoir une bonne conversation avec quelqu’un. Un mât de fortune auquel pend un morceau de toile témoigne d’un épisode vraiment dramatique. L’hypothèse du naufrage se confirme. Ou d’une mutinerie ? D’une évasion  ? Nous pointons sur l’objet.
Je remonte.

Je reprends. Nous n’approchons pas vite. Je vous expédie la présente en attendant d’en savoir davantage. Dites-moi comment vous vous êtes sauvé. Il me tarde de le savoir.
Je remonte.
C.