Intermède baveux

Le jeune et fougueux escargot qui sommeille en moi ne manque jamais de s’ébrouer de temps en temps. Ce ne sont alors sur mes traits bouleversés par l’irruption de l’animalité que l’expression d’une indomptable envie de chou. Or s’il est un légume (je crois que le chou est un légume) dont l’absence est un constat sans appel en mon charmant logis, c’est bien le chou.

Le problème, quand on est habité par l’escargot, c’est que le magasin le plus proche vous parait si loin que ce n’est vraiment pas la peine de tenter l’expédition. Sans compter que ramper dans la rue vous expose aux quolibets. La plupart des êtres humains sont plus volontiers habités par des loups cruels ou des perroquets railleurs qui ne manquent jamais une occasion de se gausser des faibles gastéropodes.

Amère position ! Il n’était rien à faire que se préparer une omelette baveuse et la manger tristement. Trois jours plus tard, l’escargot sortit de moi comme il était entré. Sans prévenir. Je terminai l’omelette en deux bouchées. Par la fenêtre, le ciel de Brest accumulait des nuances de gris. Hélas ! me rendis-je compte en défaisant mon paquetage (je revenais encore d’un périple au bout du monde lorsque l’escargot me prit), hélas, j’avais oublié d’y glisser ce volume de Louis Barjon, Le marin, dont j’escomptais publier la critique ici-même en ce jour.

Pas de livre. Pas de critique, donc.

A la place, je suis allé voir la mer. Tout va bien. L’océan clapote. Les petits poissons et les monstres marins s’amusent dans les profondeurs. Retour chez moi, j’ai regardé Zorro à la télévision. Bof. Cela me rappelle un poème écrit autrefois :

Resserrant contre lui le plaid qui l’emmitoufle
Zorro baille et se sent tout d’un coup flagada ;
Niché dans un fauteuil, il songe à Mathilda ;
Au bout de son orteil balance une pantoufle.

Zorro baille et se sent tout d’un coup flagada,
La pendule a sonné, la chandelle s’essouffle ;
Au bout de son orteil balance une pantoufle
Et Zorro s’assoupit, susurrant « querida ».

La pendule a sonné, la chandelle s’essouffle,
La nuit comme un drap sombre emplit la véranda
Et Zorro s’assoupit, susurrant « querida ».
Au sol gît la capa qu’un pistolet boursoufle.

La nuit comme un drap sombre emplit la véranda.
Dors, Zorro, dors : demain tu chasses le maroufle.
Au sol gît la capa qu’un pistolet boursoufle
Avec une rapière en guise de barda.

Dors, Zorro, dors : demain tu chasses le maroufle.
Ton cheval court très vite en faisant tagada ;
Avec une rapière en guise de barda
Ton bras ne peut faillir, ta vigueur époustoufle !

Ton cheval court très vite en faisant tagada,
Il file comme un trait, il passe comme un souffle.
Ton bras ne peut faillir, ta vigueur époustoufle,
A toi seul tu es brave autant qu’une armada.

Il file comme un trait, il passe comme un souffle
Sans qu’il y ait besoin que l’on dise « hue dada » ;
A toi seul tu es brave autant qu’une armada :
Sauve les malheureux qui sont dans la mistoufle !

Je ne saurais dire, à présent, d’où me vint cet impérieux besoin de rimes en « ouffle » et en « da », qu’un poème sur Zorro seul pouvait satisfaire. Je sais seulement que je composais cela la veille de Noël et qu’on allait m’offrir une paire de chaussettes et des jolis bouquins. Tels sont les mystères de la création. Ouais mon pote.

 

La semaine prochaine : Le marin, par Louis Barjon, dans la collection « Nos beaux métiers par les textes », X. Mappus éditeur, Le Puy.

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Le soldat

« Parmi nos beaux métiers, murmurais-je pensivement en arpentant la lande, bras croisés derrière mon dos et le chapeau haut de forme négligemment posé sur le sommet de mon crâne, il est bien difficile de se prononcer sur celui qui serait le plus beau de tous. Le beau métier d’homme-sandwich ne manque pas d’intérêt, tandis que la belle profession d’acrobate a su rendre utile à tout jamais l’invention du trapèze. Pour ne citer que ces deux exemples. »

J’étais arrivé à ce point de ma promenade où, campé sur le faîte d’un rocher qui domine les alentours, je contemplai ce morne pays qui me vit naître et que les millénaires ont érodé patiemment. Il n’est, au soleil couchant, pas de plus grand spectacle.

« Quel est le plus beau métier du monde ? » demandai-je alors aux éléments. Mais les éléments ne répondirent pas. Je retournai passer le reste de l’hiver dans ma chaumière où je fourbissais mon épuisette pour partir à la chasse aux papillons lorsque le printemps serait venu. Certain soir, près de l’âtre, je relus un ouvrage de louis Barjon :

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Le métier de soldat méritait bien qu’on lui consacre un volume de la collection « Nos beaux métiers par les textes ».

La présente édition date de 1945. Le principe est le même que celui présenté la semaine dernière. Pas de préface ici. Le petit mot du maréchal Pétain, en exergue du livre sur le paysan, de 1941, est remplacé par un portrait du général De Gaulle, ce qui prouve bien que dans le beau métier d’écrivain il faut se tenir au courant de l’actualité.

Écrivain, oui, car les quelques lignes d’introduction aux extraits des grands auteurs publiés dans chaque chapitre suffisent presque, par leur fulgurance, à dispenser le lecteur de consulter les extraits en question :

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Que dis-je ? Il est à peine besoin de regarder ces entrées de chapitre, tant la puissance d’évocation de Louis Barjon est grande. La consultation du sommaire permet de se faire une idée de l’essentiel. Tenez, les qualités du soldat, par exemple :

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Ce sont les mêmes que celles du joueur de domino. Je suis imbattable au domino, et je peux vous dire que tout est vrai (sauf l’esprit chrétien, qui indiffère la plupart des joueurs). Naturellement, il existe quelques différences entre la guerre et les dominos. On les perçoit de-ci, de-là :

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Il est à noter que c’est grâce de remarquables qualités que le soldat atteint à cette grandeur de mourir évoquée plus haut :

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Il y était prédestiné. Heureusement, il n’était pas le seul concerné par le sacrifice :

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Quant aux textes choisis, les poèmes sont pris parmi certains de Vigny, Victor Hugo, Louis Mercier, Péguy ou Rostand. Curieusement, Le dormeur du val n’y figure pas.

 

 

La semaine prochaine : Le marin, par Louis Barjon, dans la collection « Nos beaux métiers par les textes », X. Mappus éditeur, Le Puy.

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Charpentes

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Le semeur de charpentes
N’a pas l’ombre d’un toit
Sous la lune il s’en va

Comme il va par les sentes
Sans objet ni demeures
Les charpentes se meurent

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Le Paysan

« Nos beaux métiers sont rarement exaltés par la littérature », me disait l’autre jour un partenaire de plongée alors que, revenus d’une expédition dans la fosse des Mariannes, nous ôtions nos scaphandres.

 « Sapristi ! » vitupérai-je. Ignores-tu que Louis Barjon initia en 1941 par un volume consacré au paysan (et un peu à la paysanne aussi) une collection intitulée justement « Nos beaux métiers par les textes » ?

 Cet ami l’ignorait. On plonge dans des abysses avec des gens, et puis on se rend compte un jour qu’au fond, en surface, on ne partage pas grand-chose avec eux. Je m’empressais donc d’instruire ce fidèle compagnon avant même de me sécher les cheveux (j’avais une fuite dans le joint de mon hublot).

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L’exemplaire ci-dessus provient des archives de la bibliothèque d’un lycée. Il commence par une préface qu’aucun élève ni professeur ne lut jamais au-delà des premiers paragraphes, parce que les quelques pages suivantes n’ont pas été séparées au moyen d’un coupe-papier.

Chouette.

Rien n’est plus rigolo que de séparer les pages d’un livre avec un couteau. La plupart du temps il s’agit d’un recueil de poésie intitulé Gris souvenir ou Temps imparfait. Avec un peu d’imagination on peut éprouver la sensation d’assassiner le poète.

« Pour que revive le pays, il faut que les Français retrouvent le goût de l’effort et du travail », déclare Louis Barjon, sans pourtant donner de précision sur la saveur en question. (Je soupçonne un truc amer). Le principe de la collection « Nos beaux métiers par les textes » est de mettre le doigt sur ce goût mystérieux à force de lire des extraits d’auteurs qui, s’ils n’ont pas eux-mêmes exercés les métiers en question, n’ont pas manqué de les observer. Comme, en revanche, les personnes qui les exercent, trop fatiguées, n’ont pas eu souvent le temps d’y réfléchir suffisamment pour en saisir l’essence, le monde est bien fait.

Le premier volume est consacré au paysan :

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Ce volume est divisé en deux livres : L’éternel paysan et Le paysan français. Chaque livre est découpé en chapitres. Tous les chapitres sont composés de rubriques. Chaque rubrique est surmontée d’un chapeau de l’auteur, tel que celui-ci par exemple :

lepaysanmysterevegetalÉclairage des plantes par un regard paysan ; entête à la rubrique « La vie végétale »

 

Suivent en vrac des extraits de Charles Péguy, René Bazin, Henri Pourrat etc.

 Les rubriques les plus drôles sont : La loi de l’effort, Fatigue, Pauvreté, Plainte et lassitude, Maturité paysanne, L’automne, Le vieillard, L’hiver, La mort, Le métayer, Le maître, Le bel ouvrage, les Grands Enfants, L’amour paysan, Bonheur et soucis et Vérité dernière.

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Une citation du maréchal Pétain, qui peut-être ne figure plus dans les rééditions d’après-guerre, est en exergue du deuxième livre. La vérité m’oblige à révéler que j’en parcourus les derniers chapitres d’un œil distrait, le coupe-papier à la main, heureux de constater qu’il y avait de l’ouvrage à séparer des pages dans cette partie de l’anthologie. J’étais une espèce de moissonneur, en somme. Il ne sera peut-être point rare qu’un de mes enfants (j’en ai douze ou quinze) s’achemine vers un sacerdoce de boulangerie :

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Mais j’en doute. Cette saloperie de couteau m’est rentrée dans le gras du pouce. Aïe.

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Un ami citadin, frappant à ma porte, me prit sous le bras, et nous allâmes, insouciants, à la poissonnerie de plaisance la plus proche parce qu’il voulait s’acheter un poisson rouge. Je n’aurais jamais soupçonné qu’il existait un si grand nombre d’espèces de poissons. Une rapide estimation du volume d’eau contenu dans les océans, comparé à celui des aquariums de la petite boutique, me fit soupçonner qu’il en existait davantage. C’est à ce moment que naquit ma vocation scaphandrière.

 

La semaine prochaine : Le soldat, par Louis Barjon, dans la collection « Nos beaux métiers par les textes », X. Mappus éditeur, Le Puy.

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Cité nouvelle

Insatiablement le jour commence. Insatiablement le jour finit. C’est toujours l’heure d’apprendre à lire. Apprenons à lire aujourd’hui dans un manuel du cours élémentaire de 1975 :

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Entre des poèmes de Desnos et Prévert, le jeune Rémy Dumont – sept ans et quatre mois – partage avec nous son horrible quotidien, que les auteurs ont semés d’exercices cruels où papa travaille :

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Tout commence par un déménagement. Les Dumont quittent leur petite maison de la rue du Vieux Moulin pour un grand immeuble avec une pelouse interdite aux enfants. Par la fenêtre de sa chambre, Rémy voit « les immeubles neufs, les larges avenues, le boulevard, les autos et les camions qui roulent en files ininterrompues, et même, au loin, les quatre voies de l’autoroute. » A l’école, son institutrice, une certaine Annie Martin, le nomme responsable de l’atelier de peinture. Le petit garçon se réfugie dans l’art, mais on sent que le cœur n’y est pas : « Puisque le temps est gris et triste, je vais mettre sur mon dessin toutes les couleurs de l’été ».

cnexercice2Pauvre Rémy

En allant faire les commissions, il achète un paquet de coquillettes à la place de la levure. Il s’aperçoit, la nuit, de ce qu’il n’a pas besoin de consulter une montre pour connaître l’heure : les voitures démarrent à vingt heures, reviennent à minuit. On entend des portières. Plus tard, des jeunes bavardent sous les fenêtres. Les avions font trembler les vitres. A quatre heures du matin les ouvriers se rendent à l’usine en vélomoteur. Le camion poubelle passe à cinq, puis c’est la douche et le transistor du voisin. Ce n’est que lorsqu’il est malade que tout ce bruit le fatigue vraiment.

cnhorlogecnlebonheurC’est toujours pour demain

L’hiver commence. Au supermarché, le prix de la tablette de chocolat a encore augmenté. Heureusement que maman a trouvé facilement une place sur le parking où « des centaines de voitures sont déjà alignées ». On offre un tour de cheval mécanique à la sœur de Rémy, « mais, près d’elle, un petit garçon à la peau brune la regarde avec envie : c’est bien cher un tour sur le cheval mécanique. »

A l’école, il faut encore apprendre le début de l’alphabet jusqu’à la lettre f :

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Pendant les vacances, il passe une semaine revigorante chez son Pépé, qui lui a laissé un coin de potager pour lui tout seul. Hélas ! Les laitues sont dévorées par de fourbes escargots !

cnalphabet2A l’école, on poursuit l’alphabet jusqu’au k

A partir de cet instant, Rémy se réfugie dans les belles histoires. Le chevalier Thierry revient de la Croisade. Sa dame l’interpelle depuis une haute tour ; il ne peut encore monter la retrouver pour contempler les étoiles, car on vient de lui apprendre la mort de son père.

cnalphabet3C’est aussi bien de réviser l’alphabet

La fin de l’année approche. On commence à classer les choses par ordre alphabétique. Pour la fête des mamans, Rémy offre à sa mère un pense-bête afin qu’elle puisse écrire la liste des commissions.

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Les dernières pages sont l’évocation des prochaines vacances d’été. Sur la plage, Rémy s’amuse avec Régis, un camarade. « Va chercher ton matelas pneumatique, dit Régis. Nous nous allongerons dessus, l’un après l’autre, comme sur un radeau ».

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L’enfant est à présent assez mûr pour classer les mots de cette phrase, qui figure dans le paragraphe 4, par ordre alphabétique.

 

La semaine prochaine : Le paysan, par Louis Barjon, dans la collection « Nos beaux métiers par les textes », X. Mappus éditeur, Le Puy.

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Ticket de caisse

Minuit sonne lugubrement. Sur la Grand-Place on distingue un fantôme qui, pâle et soupirant, flotte au gré d’une brise glacée à travers des arcades. Ce fantôme, c’est moi. Ma petite chambre douillette est cette Grand-Place vide où tout à l’heure encore il passait une foule joyeuse et bigarrée, comme il passa dans mon existence un flot tumultueux qui était le flot du bonheur et de l’insouciance. Quelques chiens errant errent en silence. Une affiche déchirée se lamente au mur. Minuit sonne une fois de plus au carillon, car l’heure funeste ne s’éteint jamais. Je regarde le décor sinistre et des larmes amères mouillent ce drap indistinct qui compose tout mon être.

 La faute à ce coup d’œil que j’eus ce soir en sortant du magasin sur mon ticket de caisse :

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On fait le point sur l’humanité dans toutes les grandes surfaces. Les bilans individuels sont imprimés sur des petits papiers. De la taille d’un miroir de poche. On fouille fébrilement sa veste ou son sac pour en ressortir la liste de courses, mais il est trop tard.

ticketcaisselistecourses

Pourtant, j’étais sûr de moi. Pourquoi me suis-je ainsi fourvoyé ? Les ténèbres couvrent soudain la ville. Je rentre d’un pas lourd. Mon dos voûté peine à compenser ce ventre replet qui bossue disharmonieusement une silhouette autrefois svelte et gracieuse. Dans ma chambre douillette il se murmure entre deux bouchées que les meilleures intentions sont vaines.

 On voit sur la Grand-Place un chien hurler à la lune.

La semaine prochaine : Cité nouvelle, par P. Vézinet et G. Gros, librairie Istra, 1975

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Annales du bac 94 maths CE

A l’époque où je traversais la Sibérie à dos de chameau, je puisais dans le souvenir des poèmes appris à l’école un bien-être que l’âpreté du climat et les rigueurs du voyage ne surent entamer tout à fait. A Vladivostok, je fournis son stock de joints de culasse à mon commanditaire et repartis dans l’autre sens avec une cargaison de boulons de 16 en évitant les douaniers et les tigres.

 C’est une époque lointaine. Aujourd’hui, je regarde par la fenêtre depuis la couche où je vis mes derniers instants, et si j’aperçois dans le jardinet quelques joints de culasse égarés ou deux ou trois boulons, vestiges d’une existence vouée à la contrebande et à l’aventure, le malheureux vieillard qui écrit ces mots ne trouve aucun réconfort dans leur contemplation. Quant à la poésie, elle ne me procure d’autre sentiment qu’une intense mélancolie. Un mince recueil, que le hasard m’offrit il y a quelques mois, est aujourd’hui posé sur mon chevet. Sa verte couverture luit doucement dans la semi-obscurité. D’une main aux doigts trop maigres je le saisis pour en feuilleter les pages délicates, et – kof, kof, je tousse – il me semble revivre l’espace d’un instant mes enthousiasmes lycéens :

bac94annales

Kof.. Kof… Hélas ! Que me fait, à présent, que le plan (P) soit rapporté à un repère orthonormal ? Je suis vieux. Les rides ont imprimées sur mon visage un canevas indélébile où l’on devine que le sourire a tenu moins de place dans mon quotidien que l’amertume et la grimace (j’ai longtemps été clown dans un pauvre cirque)… Reuh… Kof… Kof… Autrefois, je m’émerveillais du losange ABCD tel que OB = 2OA, et je piaffais de répondre aux questions. A présent, j’éprouve surtout… de la nostalgie. Teuh.

bac94losangeABCD

 

Que n’ai-je encore dix-sept ans pour montrer que le barycentre I des points B, C et D affectés respectivement des coefficients 2, -1 et 1 est le milieu du segment [AB] ?… Raaah… Kof… Teuh… Il me semble que je saurais encore m’y prendre, mais je n’ai pas le courage… Kof… Ni celui de cal…calculer la probabilité… pour que…. l’équipe… Aaaah….

  bac94probabilites

 

Aaaargh…. Raah… Kof… Cela… Me rappelle… Teuh…. Les exercices pour sportifs de haut niveau :

bac94epreuve_haut_niveau

Raaah… S’ils réussissaient, ils pouvaient… devenir… remplaçants… en Ligue 1… Teuh. S’ils rataient… Teuh… journalistes sportifs. Raah. Kof kof kof. Mais… Teuh… que… kof… kof… teuh… Aaargh… qu’y a-t-il donc…Je… J’ai mal… Je…Raaah… Je vois un quadrilatère… Teuf… Kof… segment [AB]… Il est…

 C’est merveilleux… La.. Reuh… Aaargh…. Teuh…. Décrit une ellipse… REUH REUH REUH kof… Arrrgh.. P est inclus dans H… asymptote… beauté… Kof… J’en déduis…

 Que…

Je ressusciterai vendredi prochain pour la critique littéraire d’un ticket de caisse.

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Almanach catholique pour 1934 (2eme partie)

Tout est mathématique. On compte jusqu’à dix et on lance des fusées sur Mars. Ou Jupiter. Ou n’importe où. Les planètes sont des boules dont on connaît les trajectoires. Caché derrière une lunette astronomique, en plissant les yeux, on mesure la distance qui nous sépare des choses. On envisage l’univers. On calcule sa moyenne. On cherche l’équilibre. On devine l’éternité. Quand on a trouvé le barycentre, on enfourche sa bicyclette et on court le rejoindre sur le bord d’un fleuve :

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Le curé moyen se compose d’une mère, d’un presbytère et de paroissiens qui ont la vie trop facile au bord de la Loire. On ne pas peut leur donner le goût de la souffrance expiatoire. La Vendée est plus propice. Toutefois, comme, avec la sécheresse, les fraises se sont bien vendues, ils achèteront des sépultures en première classe.

 Les hommes ne viennent jamais à l’office et n’éprouvent pas le besoin de se préparer à mourir. C’est la raison pour laquelle il a fallu, pour les attirer, un jeu de boules de fort au presbytère, et leur proposer du vin et des parties de belote chaque dimanche. Hélas, hommes et femmes « vivent et meurent sans se rendre compte que Dieu leur manque ». C’est le plus grave. Après la Toussaint commence la quête pour le denier du culte, qui n’est pas très drôle mais bien pratique pour visiter la paroisse. Aux beaux jours elle est remplacée par le jardinage ou la pêche.

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Le catéchisme se donne le matin. Il se termine à la communion solennelle, qui permet aux parents de se souvenir de leur propre communion solennelle. C’est l’occasion de rouvrir les âmes au monde spirituel. Ensuite, ce sont à moitié les vacances.

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L’Almanach catholique pour 1934 regorge de noms : Mauriac, Ampère, l’abbé Sautel, Jérusalem, Rome, le Mont-Valérien, Saint André-Hubert Fournet, Montalembert, Biquette (22 ans), Linotte (18 ans), Marmotte (20 ans), Militante (21 ans) et Benjamine (15 ou 8 ans, au choix), toutes cinq héroïnes d’un à-propos pour œuvres de jeunes filles, Saint Modeste, le Christ et même Gargantua, dont on ne conseille pas la lecture mais dont on peut publier avec bonheur quelques extraits bien choisis, pourvu que n’y soit jamais mentionné le règlement de l’abbaye de Thélème.

Dans le Petit annuaire du monde catholique on apprend que le Révérend Père Henry-Joseph-Antoine Pinard de la Boullaye, conférencier de Notre Dame, reçoit, durant le carême, lundi, mercredi, et vendredi, de 13 à 18 heures et sur rendez-vous (téléphone : Vanves, Vaugirard 03-22). On ignore le nom du curé moyen. Il se réjouit de la récolte des fraises. Il donne l’extrême-onction. Il baptise. Il « débouche une nouvelle bouteille de « rosé » frais et onctueux, avec un admirable parfum de framboise. » Au fond de sa charmille. En lisant « avec gourmandise sa Revue des Deux-Mondes ».

 Il attend l’invasion des topinambours géants.

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Pour empêcher la guerre de revenir, Marie-Rose, 13 ans, veut offrir un grand sacrifice à Dieu. Elle songe d’abord à la santé de ses parents et de sa sœur. Ensuite à sa propre vie. Elle se résout finalement à renoncer à sa place au paradis en échange de la paix. Le curé la sermonne et s’émerveille.

 

Vendredi prochain : Annales du bac 94, mathématiques CE.

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Almanach catholique pour 1934 (1ere partie)

Les cieux lointains sont remplis d’étoiles. Il arrive que le soir, penché sur l’univers, on lève une tête émue dans leur direction pour songer à la cosmogonie. On a l’intuition des extraterrestres qui gesticulent de tous leurs dix-huit bras. Ils sont mauves, avec des poils caoutchouteux sur les mains. Derrière une étoile double, quelque part, il existe une planète immobile dont la surface est couverte d’une végétation bizarre. Ailleurs dans l’espace, des peuples inconnus papotent, des histoires intersidérales surgissent au détour d’un astéroïde et des sortes de topinambours cruels fomentent d’envahir la Terre. L’univers est un grenier rempli de souvenirs.

C’est-à-dire qu’on ouvre des malles pour en sortir de vieilles choses. Du tissu. Des jouets. Des lettres. Un abat-jour déchiré. Les dernières nouvelles de l’espace-temps :

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Symphorien Bullioud, évêque de Soisson, mourut. C’était en 1534. Un 5 janvier, funeste entre tous, et le 8 avril 1834 Montalembert supplie Lamennais de ne pas publier les Paroles d’un croyant. Le 30 mai 1434, Procope le Grand et Procope le Petit sont tués à la bataille de Lipan. Procope l’Intermédiaire eut la vie sauve. Henri III prend le 30 avril 1234 des mesures contre les chevaliers français qui débarquent en Angleterre. Prendre des mesures est salutaire en cas d’invasion. C’est de la stratégie militaire. Anglaise. Les Français, dans le cas réciproque, prirent des dispositions. Le 11 avril 1034 Michel le Paphlagonien est sacré à Constantinople. Il avait épousé Zoé. Mort de S. Landulphe de Vareglade le 7 juin 1134. Que dire de la lettre de Constantin, datée du 18 juin 434, « en faveur des veuves, des orphelins et des malades » ? Qu’il était bien inutile de craindre leur disparition. Clément VII a rédigé son testament le 30 juillet 1534. Il mourut ensuite. C’était à prévoir : le 21 septembre est le cinq centième anniversaire d’une nouvelle aggravation de son état.

On n’avait pas encore eut l’idée de certain médicament qui l’aurait sauvé :

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Il n’est d’ailleurs pas très compliqué de se maintenir en bonne santé, quand on connait les gestes adéquats :

ac1934pubhernieSoin de hernie par la lecture

C’est l’intérêt de la littérature. Tourner des pages vous soulage le dos. Il s’agit d’une forme de yoga, autrefois réservé aux bénédictins, devenu populaire après que Gutenberg a conçu l’imprimerie. On peut se demander s’il est vraiment utile d’acquérir le livre de la publicité, ou si d’autres ouvrages tout aussi fournis en pages ne suffisent pas à prévenir le mal. Tant pis pour M. A. Claverie, spécialiste breveté. Il vaut mieux se plonger dans Verlaine. Ou Gaston Lagaffe. Ou l’Almanach catholique pour 1934.

Car le remède à la crise y est écrit en gros caractères :

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Les maîtresses de maison les plus soucieuses n’ont à présent pas d’autre choix que d’en servir. Le monde en tournera plus rond.

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Ce programme de lutte contre la vie chère commence par trois gâteaux :

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Il se poursuit par d’autres, dont la composition n’est pas donnée :

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La juste réputation du Sans-Rival n’est plus à faire. Zoé la Paphlagonienne en mangeait déjà en 1034. Son époux, Michel, édicta qu’il était obligatoire de le déguster à l’heure du thé. C’est l’explication de la prospérité byzantine. La manufacture des biscuits Pernot n’en tire pas vanité :

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La semaine prochaine : suite et fin de l’Almanach Catholique pour 1934. Il sera question des nombreuses rubriques qu’il contient et de l’article intitulé : Causerie sous une tonnelle devant la Loire, avec mon curé-moyen, par E Jarry.

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Eloïse et Tabouret

Le professeur Tabouret, sa nièce et l’archéologie :

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